Reconnaître 4 fleurs printanières du Mont-Royal

Chaque année, dès la fin de l’hiver, les fleurs printanières se lancent dans une véritable course contre la montre. Le but ? Compléter leur cycle de croissance avant que la lumière du soleil ne soit tamisée par le feuillage des arbres. Découvrez dans cet article quatre variétés de fleurs printanières qui égayent les sentiers et les sous-bois du Mont-Royal : le tissulage, la sanguinaire, le trille blanc et l’érythrone d’Amérique.

Le tissulage (Tussilago farfara)

Le tussilage, également connu sous le nom de pas-d’âne, est une plante qui annonce le printemps de par sa floraison précoce, souvent dès le mois de mars. Émergeant courageusement à travers la neige et les feuilles mortes, ses fleurs jaunes rayonnent, signalant le renouveau de la nature.

Son nom latin, Tussilago, dérive de “tussis” (toux) et “agere” (chasser), témoignant de ses propriétés antitussives bien connues. Dès l’arrivée des premiers colons français à Québec, le tussilage fut introduit en Amérique du Nord pour ses vertus médicinales, devenant rapidement une plante courante car très facile à cultiver. Il se plait dans les sols pauvres et argileux, si bien qu’on le trouve fréquemment dans els terrains vagues, au bord des routes et des chemins. Au Mont-Royal, il se rencontre fréquemment le long du chemin Olmsteed.

En herboristerie, le tussilage demeure prisé pour ses feuilles et ses fleurs fraîches ou séchées, réputées pour leurs propriétés antitussives, adoucissantes, anti-inflammatoires et astringentes. Cependant, il convient de noter que ces parties de la plante renferment des alcaloïdes potentiellement toxiques pour le foie, si bien que certains pays, comme l’Allemagne en ont interdit la vente. Malgré la présence de ces substances toxiques, les cas d’empoisonnements sont rares, et l’utilisation du tussilage à des fins médicinales est considérée comme sans danger tant que les quantités sont raisonnables.

Outre ses applications médicinales, le tussilage offre également une option culinaire intéressante. Les fleurs et les jeunes feuilles sont comestibles, pouvant être utilisées dans des recettes telles que la poêlée de tussilage, dont je vous propose la recette ci-dessous.

La poëlée de tussilage

Ingrédients

  • 5 poignées de fleurs avec leurs tiges

  • 25g de beurre

  • 2 cuillères à soupe d’huile d’olive

  • sel, poivre

Instructions

  • Faire fondre le beurre, ajouter l’huile et cuire les fleurs à feu vif pour dorer et conserver le croquant. Assaisonner. Servir chaud.
  • Si la cueillette est maigre, transformer la poêlée en omelette ou servir avec du riz.

La sanguinaire (Sanguinaria canadensis)

La sanguinaire du Canada est une plante herbacée vivace, au latex rouge sang, et formant souvent des colonies denses au sol. Sa feuille unique est découpée en de grands lobes sinueux. Sa floraison est précoce au printemps, mais éphémère. La fleur unique de la sanguinaire, composée de 8 à 16 pétales blancs, ne dure qu’un ou deux jours.

La sanguinaire est bénéficie de la protection de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Il est donc interdit de la cueillir! Bien que sa disparition ne soit pas immédiate, la sanguinaire du Canada est menacée par plusieurs facteurs, dont le broutage par le cerf de Virginie, la coupe forestière, et la destruction de son habitat due au développement urbain et agricole.

La sanguinaire tire son nom de sa sève rougeâtre, utilisée par les Amérindiens comme teinture pour le corps et les objets artisanaux. Dans certaines nations, elle était même utilisée comme philtre d’amour. Il suffisait d’appliquer le latex de la plante sur la paume et de serrer la main de la personne convoitée pour que celle-ci tombe sous le charme. Attention cependant, la plante contient de la sanguinarine, un alcaloïde toxique, pouvant causer des effets nocifs allant des vomissements aux troubles cardiaques et visuels, voire la mort, à dose élevée!

Le trille blanc (Trillium grandiflorum)

Le trille blanc, est l’une des premières fleurs à éclore dans les forêts du Québec. Parmi les trilles présents au Québec, c’est celui qui arbore la plus grande fleur, d’où son nom alternatif de trille à grande fleur ou trille grandiflore. Sa croissance est extrêmement lente, avec pas moins de 15 stades de croissance. Il faut près de 10 ans pour qu’un trille produise sa première fleur! Les érablières riches du sud du Québec offrent les conditions idéales pour sa croissance, mais il est en danger dans la province, ce qui lui permet d’avoir le statut d’espèce vulnérable. Il est interdit de le cuillir, d’autant plus que la cueillette de la fleur tue la plante.

Il est reconnaissable à ses trois feuilles, et à sa fleur composée de trois pétales blancs, qui virent au rose avant de faner. Ses fleurs peuvent présenter des variations telles que des fleurs doubles, des pétales en nombre différent, ou des pétales déformés, souvent stériles, dues à une bactérie.

Les fourmis jouent un rôle crucial dans la reproduction du trille blanc, collectant ses graines pour les stocker dans leurs fourmilières. Les conditions environnementales favorables dans les fourmilières permettent ensuite la germination des graines et la naissance de nouveaux plants.

L’érythrone d’Amérique (Erythronium americanum)

L’érythrone d’Amérique est une plante résolument printanière, qui a besoin de beaucoup de lumière et doit compléter son cycle de vie avant que les feuilles des arbres ne lui cache le soleil. C’est une plante à croissance très lente. Sa première feuille pousse après seulement trois ans, et il lui faut entre 7 et 10 ans pour produire sa première fleur. Celle-ci s’épanouit uniquement sous les rayons ardents du soleil et se referme chaque nuit. Une fois établie, une colonie d’érythrones peut perdurer en moyenne 150 ans, témoignant de sa robustesse et de sa longévité.

Un plant adulte porte deux feuilles assez rigides, lustrées et pointues. Elles sont vert pâle, tachetées de brun. La fleur est unique. La fleur solitaire comporte trois pétales jaune or et six étamines, trois longues et trois courtes, pourpres et parfois jaunes.

Certaines parties de l’érythrone sont comestibles : ses feuilles bouillies se mangent comme un légume, et ses jeunes feuilles tendres et ses fleurs peuvent se manger en salade, seules ou en mesclun. Ses bulbes sont nourrissants et sucrés. Ils sont vomitifs à forte dose et la prudence est de mise.

En plus de son intérêt culinaire, L’érythrone d’Amérique a des vertus médicinales puisqu’elle contient une substance antibiotique. Ses feuilles fraîches étaient employées en cataplasme sur les enflures et les ulcères par les Premières Nations.