France – Canada, les différences du système bancaire
Un des changements auquel il faut s’habituer lorsque l’on arrive au Canada, c’est la façon dont marche tout le secteur bancaire. On ne paye pas de la même façon, les cartes de paiements sont différentes, et les types de crédit également. Mais premier point de différence, les banques n’évalue pas de la même façon qu’en France la solvabilité d’un client…
Le Credit Score
Le Credit Score est une invention des USA qui s’est propagée rapidement au Canada (et maintenant dans le monde) : il s’agit d’une sorte de fichier des incidents de paiements de crédit et des montants empruntés. La qualité d’un Credit Score s’exprime en une note, qui varie généralement de 550 (très mauvais / très haut facteur de risque pour la banque) à 800+ (la note parfaite). Au niveau bancaire, c’est la seule chose qui fait foi, la seule chose qui compte.
En France, on vous accordera un crédit après un examen approfondi de votre situtation financière : crédits en cours, revenus, situation professionnelle, historique du compte, montant des dépenses mensuelles, toutes les infos disponibles sont utilisées par le banquier pour savoir si vous êtes capable de rembourser le crédit. Au québec, tout cela n’a aucune importante. On regarde juste votre credit score, et si la note est bonne, vous aurez le crédit. Le score traduit deux infos : combien la personne a déjà emprunté, et est-ce qu’elle a remboursé rapidement ? Le Credit Score en France arrive peu à peu, en même temps qu’avance l’idée de la création d’un fichier positif pour le surendettement…
Conséquence du Credit Score sur les modes de paiements.
Un des effets directs de la prépondérance du Credit Score, est la quasi obligation d’avoir et utiliser une carte de crédit.
Au Canada la carte de crédit telle que nous la connaissons en France n’existe pas. En France, on peut avoir une carte de crédit à débit immédiat (sans crédit en fait puisque les achats sont débités immédiatement du compte) ou à débit différé. Dans ce cas, l’intégralité des achats est débitée automatiquement le dernier jour du mois, sans intervention du détenteur de la carte. Au Québec, la carte de crédit à débit immédiat correspond à la carte de débit (Interac), utilisable uniquement chez les commerçants (et non sur internet sauf cas particuliers). La carte de débit à paiement différé n’existe pas. Son équivalent est la carte de crédit, qui correspond en fait à la carte revolving française. Cette carte vous offre une réserve d’argent permanente (premier pallier : 1000$), que vous pouvez utiliser à votre guise. Tous vos achats sont exemptés d’intérêts pendant 21 jours. Si vous ne remboursez pas dans ce délai, la banque vous facture des intérêts élevés tous les mois (20% environ). C’est à vous de faire un virement à chaque fois pour rembourser le crédit.
Le Credit Score est directement lié à l’utilisation de votre carte de crédit. Il est influencé par les sommes empruntées, et les délais de remboursement. Si vous payez le maximum de choses avec votre carte et que vous remboursez dans les 21 jours, votre credit score s’améliorera rapidement, ce qui vous permettra de demander des crédits plus importants comme par exemple des crédits immobiliers ou des crédits autos, ou d’augmenter le plafond de votre carte de crédit.
Attention : mon banquier me signalait que les Français laissent souvent passer la date prévue de remboursement sur de petits montants car on est habitués en France à juste risquer des agios. Au Canada, les conséquences sont beaucoup plus graves, puisque chaque incident de paiement réduit considérablement la note du Credit Score.
Vous allez donc vous retrouver avec 2 cartes de paiement : la carte de crédit, et la carte de débit. Cette dernière est directement liée au compte bancaire. Lorsque l’on paye en « débit », la somme est aussitôt prélevée du compte (mais elle compte pas dans le credit score). Dans tous les magasins, au moment de passer en caisse, vous aurez droit à la question : « débit ou crédit ? ».
Retirer du liquide
Les distributeurs automatiques de billets au Canada sont un peu plus compliqués. Si vous retirer du cash dans un distributeur qui n’appartient pas à votre banque, vous aurez des frais à payer. Idem si vous retirez dans un ATM (distributeurs présents dans les cafés, bar, dépanneurs, etc…). Souvent, vous devrez payez 2$ de frais juste pour retirer du liquide !
L’astuce, pour éviter de courir après les distributeurs affiliés à votre banque est d’utiliser votre carte de débit au supermarché. Quand vous payez vos achats à la caisse, vous pouvez demander à la caissière de vous rajouter du cash. Elle débitera votre carte du montant de vos courses additionné du cash demandé, et vous le donnera en billets. C’est sans frais !
Obtention de sa première carte de crédit.
Lors de votre arrivée, la banque canadienne prend un risque. Elle ne vous connaît pas, vous venez d’arriver, vous avez des feuilles de paye françaises qui ne valent pas grand chose pour lui…
Il vous faut une carte de crédit pour prendre un abonnement téléphonique notamment, et pour commencer à construire votre credit score en prévision d’un gros crédit futur. Mais pour vous donner une carte de crédit, qui ouvre des droits à un vrai crédit, le banquier regarde votre credit score, qui est vierge puisque vous venez d’arriver ! C’est le serpent qui se mord la queue !
C’est donc le seul cas dans le système où la banque va se baser sur d’autres facteurs pour déterminer si elle vous accorde une carte de crédit et surtout quel en sera le plafond maximal d’emprunt. La banque va donc se baser sur les sommes que vous transférez depuis la France, mais aussi sur votre certificat de sélection : quel emploi est indiqué, est-ce une profession en demande, requérant principal ou conjoint… tout est passé au crible.
Au final, le traitement standard est que la banque fait confiance et accorde une carte de crédit avec un petit plafond – 1000$ le plus souvent. Au bout d’un an, il vous sera possible de revenir demander au banquier une réévaluation du plafond, en fonction de votre credit score.
Que se passe-t-il si la banque estime qu’elle ne peut pas prendre le risque d’octroyer une carte de crédit ? Le banquier vous proposera alors certainement de bloquer le plafond maximum + 10% sur un fond de garantie. Vous payez à la banque 1100$ si vous voulez une carte avec un plafond de 1000$. La somme vous sera restituée soit si vous quittez la banque (après remboursement des dettes), soit au bout d’un an ou deux, si le banquier vous fait confiance. Ne vous sentez pas comme un paria si cela vous arrive, c’est TRES fréquent de devoir procéder ainsi, surtout si l’on est le conjoint du requérant principal. Pour infos, la somme est bloquée sur un compte avec intérêts, de type Codevi ou Livret A.
Petit conseil, la banque Tangerine semble donner des cartes de crédit plus facilement que les autres. Consultez ma critique de la banque Tangerine pour en savoir plus.
En plus de votre carte de crédit, vous obtiendrez automatiquement une carte de débit, qui puise directement dans votre compte. Mais attention, les banques oublient souvent de prévenir que les cartes de débit ont également un plafond (par sécurité cette fois) entre 1000 et 1500$ par jour selon les banques.
Les gros achats.
1000$ de plafond – qui est la limite généralement accordée aux nouveaux arrivants – c’est parfois très juste quand on s’installe. La aussi il existe des différences par rapport à la France.
Si par exemple vous achetez en magasin pour une grosse somme, comme des meubles chez Structube pour 3000$, normalement, même en combinant votre carte de crédit (1000$ max) et votre carte de débit (1500$ / jour), vous ne pouvez pas payer votre achat !
Il existe deux méthodes pour contourner le problème :
- Soit 3-4 jours avant l’achat vous “super-chargez” (c’est vraiment comme ça qu’on dit) votre carte de crédit : c’est à dire que sur internet, dans l’interface de gestion de votre compte bancaire, vous faites un transfert d’argent entre votre compte courant vers le compte de votre carte de crédit. Cela prend quelques jours pour être crédité, mais après votre carte vous permet d’acheter beaucoup plus. Si par exemple je transfère 3000$ sur le compte de la carte de crédit avec un plafond de 1000$, je peux acheter pour 4000$ (les 3000 qui existent + les 1000 que vous pouvez prendre à crédit). C’est très utile pour acheter sur Internet
- Soit le jour de l’achat – si possible de chez vous car la procédure est longue – vous appelez votre banque et vous demandez un déblocage de votre carte de débit – pour 1 seule journée, à hauteur du montant dont vous avez besoin. Le numéro de téléphone est souvent indiqué au dos de la carte.
Les abonnements
Faites également attention dans vos calculs de plafond : très vite votre carte de crédit va être saturée avec les abonnements : télephone portable, télévison, assurances, club de gym, électricité : tout ce beau monde se sert sur votre carte de crédit… et ça va vite !
Les frais bancaires
Là aussi, grosse différence avec la France. Quand vous ouvrez un compte courant, vous devez choisir un forfait qui correspond aux nombres d’opérations mensuelles incluses. Une opération est un virement, un dépôt de chèque, un encaissement, etc… Par exemple, on peut vous proposer un forfait “Starter” à 6$ par mois comprenant 10 opérations mensuelles. Si vous dépassez, vous paierez des frais pour chaque opération. Il est difficile de savoir quel forfait choisir, le mieux est de prendre le moins cher et de voir après plusieurs mois s’il est plus rentable de le changer. D’autres forfaits plus chers peuvent vous proposer la gratuité de toutes les opérations, ou de certaines seulement…
Actuellement, la banque Tangerine proposent des comptes sans aucun frais. Consultez ma critique de la banque Tangerine pour en savoir plus.
Différences concernant les prêts
Enfin, sachez qu’il n’existe pas différents types de crédits comme en France. De ce que j’ai pu trouver sur l’Office de la Protection du Consommateur au Québec : au Canada le crédit est un contrat libre entre les parties. Faites donc attention à ce que vous signez ! N’assumez pas par défaut qu’il existe des protections “automatiques” du consommateur…
Retour d’expérience des deux systèmes.
On prend l’habitude très vite de se servir des deux cartes, la carte de débit servant surtout pour les courses ou les petites dépenses et la carte de crédit pour les abonnements et les gros achats. N’oubliez pas non plus que la carte de crédit a des avantages en plus : elles proposent automatiquement des assurances pour les locations de voiture, ou pour les voyages, des assurances contre le vol, et…
Au final, le système canadien est finalement plus direct, plus transparent. Rien ne se joue à la tête du client, tout le monde est traité équitablement en fonction d’un seul critère : le credit score. Finalement c’est comme le processus d’immigration. Vous êtes accepté ou pas en tant qu’immigrant en fonction d’un nombre de points. Pour la banque et les crédits c’est pareil, tout se joue sur votre note de credit score !